WAD, la fin de la fin

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Soirées et évènements
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Gros 2000 alcool dossier défi film

Le caractère sacré du chiffre 7 est souvent évoqué. Les sept doigts de la main, les sept continents, les sept nains… Voilà maintenant sept jours que je fais la fête non-stop pour – coïncidence troublante – clôturer mes sept années de vie étudiante. Oui, je sais, théoriquement, je devrais donc être docteur. De ce côté, c’est raté.

Nous approchons de la fin, reste le plus difficile, l’apothéose de ce projet, l’Everest de tout Gros 2000 : le WAD, pour Week-end des Apprentis Diplômés.

Le réveil est difficile après ce qu’il faut considérer comme une soirée bien arrosée. D’autant que l’heure du levé m’est imposée par un coup de fil impromptu de ma hiérarchie :

  • Si je te cale une réunion lundi matin, ça te dérange pas ?
  • Rapide bilan des jours passés, des verres consommés et à venir. J’estime rentrer le dimanche soir dans un état proche du coma.
  • Heuuuuuuuu, non, mais j’ai pas bossé sur ce dossier.
  • Ouioui, je sais, mais personne n’a bossé dessus. Bon, j’envoi la confirmation, c’est gentil. T’es malade, t’as une voix bizarre ?
  • Là c’est plus tendu. L’explication ne cadre pas trop avec l’esprit d’entreprise. J’improvise.
  • Oué, maux de gorge avec ce temps pourri.
  • Ha OK. C’est dans l’air, ma femme a la même chose.
  • T’as raison, même chose. Si elle a bu ne serais-ce que le quart de mon total d’hier, l’embrasse pas avant une bonne semaine.

Le départ est programmé quelques heures plus tard, après un petit apéro d’échauffement. La nuit tombée, une trentaine de vétérans embraque pour un camping proche de Cabourg, avec la ferme intention de ne pas attendre l’arrivée pour commencer les festivités. On y intègre une vieille vierge (vieille pour son ancienneté dans l’école, vierge pour le fait que malgré les années passées, elle n’aie jamais été intégrée) avec force de scotch, marqueurs et cubi, tandis que son compagnon prend une année de plus sous les hourras de la foule. Toujours dans le bus, on se bat à coup de gifles et de lancer de collègues, on pisse dans des sacs poubelles et on rejoue les moments phares des grandes batailles de notre temps sous couvert des rivalités entre filières. Les prisonniers sont lâchement abandonnés à leur sort, qui inclus la constitution de montagnes humaines (autrement appelées tas), la confection de tatouages tribaux (organes génitaux inclus) et le ligotage. Nous terminons le trajet déjà salement amochés et éméchés.

Beaucoup vont se coucher ou terminer la soirée dans leurs bungalows respectifs. Les irréductibles occupent cependant dés lors la salle de soirée, percutent les premier fûts, ouvrent les premières bouteilles. Un campeur se joint à nous, et c’est le début de la fin. Il prend un ou deux verres, se targue d’une contenance hors normes et crache cordialement sur les parisiens et leur équipe de football. Puis lance des défis au cul sec (où votre niveau est inversement proportionnel à celui de votre verre), et s’aperçoit rapidement d’une légère différence de niveau entre lui et le reste de ses opposants. Ces tournées répétées ont deux conséquences fâcheuses : il se vexe, et il se saoule. Et comme tous les beaufs bourrés, il devient rapidement agressif, en veut à la terre entière et s’auto persuade de l’efficacité de ses petits points chétifs. En clair, il va tous nous casser la gueule et on fera moins les malins, déjà qu’on ne les faits pas plus que ça.

Si cet homme au demeurant charmant se souvenait de cette fin de soirée, les images de sa joue baignant dans les flaques de pluie mêlée à son propre sang ne manqueraient certainement pas de l’amuser. Gageons que ce n’est pas le cas, à la vue de son discourt au propriétaire du camping. Un contretemps qui nous aura coûté les services d’un videur pour la soirée suivante et une belle frayeur quant à notre possible départ anticipé du camping. D’où l’intérêt de notre formation, trop souvent mésestimée mais qui aurait été bien utile à notre supporter de choc : de savoir à savoir boire.

Je n’ai jusqu’ici pas évoqué un point important de ce week-end. Vous imaginez bien que trente personnes ne suffisent pas à réserver l’intégralité des emplacements d’un camping, c’est pourquoi exceptionnellement, l’événement était couplé avec le week-end d’intégration d’une autre école. De sages-femmes. Nous sommes le samedi midi, et elles débarquent toutes loches dehors n’attendant que nos offrandes de cailloux (la monnaie d’échange pour les rapports sexuels, coutume somme toute étrange, mais rapidement adoptée). On imagine alors aisément les espoirs naissant dans les esprits de tous ces diplômés en rut. Pourtant, après de brèves tentatives d’approche nautiques, nous retournons à nos activités de prédilection – boire et glander pour ceux qui débarquent – avec comme spectacle l’intégration un peu trop sage des nouvelles venues. Preuve que la lubrification n’exclue pas l’échauffement, les Gros 2000 après avoir passé leur après-midi à boire sont plus chauds que des braises dans des caleçons d’informaticiens. La soirée s’annonce sportive.

C’est le moment de débrancher votre cerveau et de vous mettre en mode American Pie, les événements qui vont suivre sont de la même teneur factuelle et intellectuelle. Nous – les occupants célibataires (3 pour être précis) du bungalow le plus squatté du week-end – avions convenu d’un défi utile pour la nuit : ne pas dormir seul, les hommes et animaux étant exclus de la liste des compagnes possibles.

La soirée commence donc, nous sommes encore pleins d’espoirs et d’ardeur. Les tentatives d’approches plus ou moins lourdes – la palme revenant à Max et son on te l’a sûrement déjà dit, mais tu ressemble trop à Clara Morgane - se multiplient, sans grand succès. Viserions-nous trop haut ? Les heures et les verres passent, les nanas se désinhibent et nos tentatives de dragues sont alourdies en conséquence. Ayant finalement chacun flairé une proie, et pour des besoins d’anonymat bien compréhensibles, nous appellerons ces demoiselles Maxounette, Pierounette et Ritounette. Que le spectacle commence.

Que les choses soient claires dés à présent, Max sera le plus gentleman de cette reconstitution. Il se contente pour le moment de danser autour de sa dulcinée en espérant ne pas rentrer broucouille (comme on dit dans le Bouchonois). Pierro n’a à cette heure si pas encore trouvé Pierounette tandis que de mon côté, j’inspecte déjà les amygdales de Ritounette avec application. Mes comparses verrouillent peu de temps après leur cible, la soirée continue de plus belle. Ritounette veut rentrer, je veux terminer la soirée, je lui dis que je la rejoindrais plus tard. Pierro et Max roulent des gamelles sur la piste. La soirée se termine, nous sommes dans notre état habituel et je demande aux colocataires de Ritounette, dans un français approximatif, de m’amener à leur bungalow. Je quitte mes comparses, tous deux bien occupés.

Arrivée au domicile conjugal, nous virons les amies de ma femme, qui nous laissent 45 minutes montre en main. Elles reviennent un peu tôt à notre goût, nous freinent un peu dans notre élan et nous intiment l’ordre de les laisser aller dormir. Dans le même temps, des Gros 2000 en chaleur (pléonasme) qui avaient suivi les demoiselles me hurlent de venir prendre un dernier apéro avec eux. J’enfile mon caleçon, vais jusqu’à la porte, constate que j’ai toujours le barreau, retire, noue et balance la capote au milieu de la pièce sous le regard consterné des donzelles, et vais prendre un verre bien mérité. Je retourne dormir du sommeil du juste.

Au petit matin, je lève le camp vers notre bungalow, où Pierro devait théoriquement officier. En chemin je retrouve Max, qui lui aussi avait découché. Tous deux le sourire aux lèvres, les mots sont inutiles. Pierro et Pierounette dorment encore, nous les réveillons à grands coups de chants et de cris. Les capotes jonchent nos sacs de voyage, merci, on vous prêtera encore notre lit la prochaine fois. Tout le monde levé, nous prenons le petit déjeuner / apéro dehors, les yeux dans les yeux. C’est l’heure du bilan, et les histoires de cette soirée d’inspiration post-lycée ont tout d’une scène de fin d’American Pie. Nous sommes définitivement restés très jeunes dans nos têtes…

Après un barbecue de circonstance viens le moment du départ, et donc des adieux, avec leurs échanges de numéros qui n’auraient jamais dû arriver. Puis le trajet du retour, avec force de relents et une fatigue somme toute légitime. Un week-end qui à lui seul résume bien ce que peut être une vie étudiante : du grand n’importe quoi. Mais est-ce vraiment terminé ?

À suivre : on passe à la suite ?